CULTUR’ACT
Renforcer les capacités citoyennes par la culture et la créativité
La journée d’étude Cultur’Act du 15 juin 2023 avait pour objectif d’analyser mais aussi d’expérimenter concrètement comment l’art, la créativité et la culture renforcent les capacités citoyennes. Elle s’est déroulée dans un lieu, le Quai 10 à Charleroi, qui fait un clin d’œil au thème, puisque ce lieu inédit associe cinéma, vidéo et brasserie, tout en développant un projet pédagogique d’approche du média vidéoludique avec un point de vue critique et créateur, dans une optique d’éducation permanente.
La culture, qu’est-ce que cela recouvre ?
En relisant un Cahier du CIEP publié en 2014 sur le thème des droits culturels, certaines réflexions ont émergé que je souhaite partager en introduction.
La première réflexion émane de Jean Blairon. Il rappelle qu’à l’époque où nos sociétés sont entrées dans la modernité, elles ont développé la faculté de produire, plus que de « simplement » se reproduire, sans une référence transcendante et impérative, comme la loi de Dieu. Pour l’illustrer, il se réfère à un héros d’un roman de Balzac, « le médecin de campagne ». Ce brave homme, médecin, maire et entrepreneur, explique ceci : « Certes je crois avoir assez prouvé mon attachement à la classe pauvre et souffrante, je ne saurais être accusé de vouloir son malheur ; mais tout en l’admirant dans la voie laborieuse où elle chemine, sublime de patience et de résignation, je la déclare incapable de participer au gouvernement. Les prolétaires me semblent les mineurs d’une nation, et doivent toujours rester sous tutelle. Ainsi, selon moi, messieurs, le mot élection est près de causer autant de dommage que n’en ont fait les mots conscience et liberté, mal compris, mal définis et jetés aux peuples comme des symboles de révolte et des ordres de destruction. » Selon ce « bienfaiteur capitaliste » comme le désigne malicieusement Jean Blairon, les prolétaires sont par nature incapables de gouverner et au contraire, sont voués à rester à leur place et à obéir. Cette conviction d’un certain ordre naturel des choses est évidemment d’autant plus prégnante qu’elle est bien utile aux forces dominantes. Ce que le capita[1]lisme a pu dire des travailleur∙ses comme dans l’exemple cité, le patriarcat ne l’a-t-il pas dit en outre des femmes (qui font d’admirables mères, mais doivent rester sous tutelle et à disposition), le racisme des étranger∙ères (avec la supposée infériorité naturelle de la race) ? Si les propos du médecin de campagne de Balzac font sourire aujourd’hui, c’est parce qu’un long chemin a été parcouru depuis…